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Et si on voyageait
29 août 2018

Extrait de Mogeo, le chant de la carpe.

   "Son enfant venait d'être recraché comme un vulgaire déchet en plastique, rongé par le roulement des vagues incessantes. L'image de son corps froid, mouillé, en partie picoré,emmêlé tel un poisson sans vie dans un filet de pêcheur la fit tressaillir. Un vide insurmontable l'envahit. Le choc violent s'écrasa contre sa poitrine et lui coupa la respiration. Un long cri silencieux vint bloquer le fond de sa gorge, au point de l'étouffer. D'apparence impassible, rien ne laissait entrevoir la tempête émotionnelle qui ravageait son être, si ce n'est l’augmentation de sa tension artérielle. Sur le point de déborder, une larme brouilla sa vision.  

     Une machine pleura à sa place. Un bip bip, de plus en plus fort, alerta une infirmière. Elle injecta un liquide transparent à l'intérieur de sa perfusion. Un calme médical la plongea dans un sommeil noir. Une fois éteinte, prisonnière de ses cauchemars, elle fut néanmoins soulagée de ses douleurs terrestres. Anna eut l'impression de s'être ainsi éveillée et endormie à plusieurs reprises le temps de sa convalescence.

      Durant cet intervalle vinrent se mélanger les souvenirs de différents visages inconnus, comme des sourires familiers, venus à son chevet lui parler, des sanglots  dans la voix. Dans l'impossibilité de discerner le rêve de la réalité sous l'effet des drogues, elle n’eut aucun souvenir de son retour en avion jusqu'en France. Captive d'un corps cataleptique, sujette à une forme aiguë de dépression, la jeune femme ne trouva d'autre activité pour s'occuper l'esprit que de se remémorer encore et encore le fil des événements qui l'avaient conduite jusqu'ici, aujourd'hui."

Mogeo, le chant de la carpe

Mogeo, le chant de la carpe 9

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